A 32 ans, Manu Galure s’est lancé dans un tour de France en chantant. De septembre 2017 à décembre 2019, il a marché d’une petite salle polyvalente à un grand théâtre, donné près de 400 concerts et parcouru pas loin de 10 000 kilomètres. Au téléphone, il dit qu’il en garde « trop de souvenirs pour pouvoir les raconter » : « J’ai rencontré plein de gens. J’essayais les chansons dès qu’elles me venaient. Il m’est arrivé plein d’histoires qui les nourrissaient. »
Son tour de France se poursuit, sous une autre forme. Le chanteur voyage désormais en camion, avec deux comparses et autant de pianos. Mais l’esprit bohémien de son voyage initiatique est demeuré : « Pendant la tournée à pied, je demandais très peu de choses pour faire un spectacle : un piano et un micro. Je me suis rendu compte que le fait de ne pas demander de projecteurs ou de sono permettait de jouer à peu près partout. Ma mobilité, le fait de pouvoir m’installer en une vingtaine de minutes et de repartir aussi sec, tout cela était très pratique. La tournée qu’on mène actuellement garde cette idée de pouvoir se poser rapidement un peu n’importe où. On ne se déplace plus à pied, on est plus lourd qu’autrefois : on a un piano à queue, un piano droit, des lumières, une sono, un décor, avec un pont et un mat central… Mais on a fait en sorte de pouvoir s’installer en 20 ou 25 minutes et de pouvoir démonter aussi vite. L’objectif est de demander aux organisateurs le moins possible de choses. En l’occurrence, on ne leur demande qu’une prise électrique. J’ai gardé ce côté nomade. On peut jouer dans une salle des fêtes, dans un garage automobile, autant que dans une salle de spectacles. »
Ce que cette grande souplesse apporte, en dehors d’un plus grand nombre de dates (la tournée actuelle en compte déjà 200), c’est un autre rapport aux spectateurs. « Avec le tour de France à pied, je suis allé jouer dans des endroits où il n’y a pas de concerts d’habitude, ou très peu. Avec notre nouveau projet, on continue. Comme je passe à la salle des fêtes du coin, les gens qui habitent à côté viennent, alors que, si on avait joué dans le centre culturel ou le théâtre qui est 40 kilomètres de là, ils ne se seraient pas déplacés. On touche des gens que d’autres artistes ne voient généralement pas. »
Héritier de Jacques Higelin autant que de Tom Waits, Manu Galure est souvent comparé aux troubadours. « Les troubadours, il y a l’image qu’on en a (une espèce de poète errant) et la réalité : les troubadours étaient le plus souvent des nobles ou des gens aisés, pas des saltimbanques » tient-il à préciser. « Les troubadours les plus connus vivaient dans des châteaux. Il y avait une dimension lettrée dans leur poésie, une dimension qui, en 1100, n’était pas accessible au bas peuple. A la même époque, il y avait une chanson paysanne mais c’était une tradition orale et elle s’est perdue. » Le chanteur, qui a monté avec des confrères toulousains le collectif Le cachalot mécanique et revendique l’aspect artisanal de son métier, se sent visiblement plus proche des derniers que des premiers. « Moi, c’est l’imaginaire du troubadour qui va au fil du vent et qui chante ses chansons qui me va » assure-t-il avant de reprendre la route vers un prochain concert.
Photo de têtière : François Mauger
Pour aller plus loin... Le site web de Manu Galure