John Luther Adams sculpte le vent

Comme un plasticien qui passerait régulièrement de la peinture à la sculpture, John Luther Adams alterne partitions pour orchestres et compositions électroniques. Ce sont les premières (notamment Become Ocean, une pièce de 2013 primée à de nombreuses reprises) qui lui valent d’être considéré comme « l’un des penseurs musicaux les plus originaux du nouveau siècle » par le critique du New Yorker Alex Ross. Mais cela n’ôte rien à l’intérêt des secondes…

Son nouvel album, Houses of wind, est basé sur un enregistrement de harpe éolienne, un instrument doté de cordes mues par le vent. Le compositeur s’est déjà servi de ses notes sur les harpes éoliennes pour écrire des partitions, comme celle de The Wind in High Places (2015), conçue pour un quatuor à cordes. En sauvegardant récemment des enregistrements de terrain réalisés en Alaska à la fin du vingtième siècle, le natif du Mississippi a décidé d’adopter une autre démarche, tant, écrit-il dans les notes de pochettes, « les voix du vent chantant à travers les cordes de la harpe [avaient] ramené comme si c’était hier la clarté de la lumière, la sensation d’espace grandissant et de possibilités infinies que j’avais ressenties à l’époque ».

Conservant la durée initiale de l’enregistrement, Adams a façonné cinq variations. De l’une à l’autre, tandis que s’accumulent les couches sonores, les humeurs changent, passant de l’inquiétude à la sérénité, du deuil à l’espoir. Bourdonnements errants, scintillements lointains, grondements sans cesse changeants… le compositeur cisèle les sons, tentant de figurer un environnement en mouvement, infiniment vivant.

« Le monde a changé depuis lors, d’une manière que nous n’aurions pas pu imaginer » confesse-t-il dans les dernières lignes des notes de pochette. « Les vents qui se lèvent autour de nous semblent maintenant plus sombres, plus turbulents et menaçants. Pourtant, si cette musique est hantée par des sentiments de perte et de nostalgie, j’espère qu’elle offre également une certaine consolation, voire la paix ».

Photo : François Mauger
Pour aller plus loin...
La page Bandcamp de l'album

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