Sur « Vif ! », Françoiz Breut prend la route de la forêt

Qu’y a-t-il sous l’asphalte ? Sur Hors-sol, le premier titre de son nouvel album, Françoiz Breut décrit une humanité sans racines, sans attaches, sans repères. « On glisse sur l’asphalte » répète-t-elle ad libitum. Mais, dès le titre suivant, tout s’inverse. Le narrateur devient un arbre dont les racines s’immisce partout : « Sous l’asphalte, je me déploie / Contourne les obstacles parfois / … / Le tarmac au dessus de moi / Se fendille, craque comme le bois / Je fouille le sol de haut en bas / Délie mes tiges, déploie mes doigts ».

Ce changement de point de vue correspond à un profond changement dans la vie de la chanteuse. En 2021, elle avait publié Flux flou de la Foule, une exploration amusée de la jungle urbaine qui l’entourait. Mais le Covid était déjà passé par là et Françoiz Breut avait envie d’aller voir ailleurs. La Bruxelloise d’adoption a donc acheté un petit bois où elle a planté une quinzaine d’arbres fruitiers. Des chansons y ont poussé, réunies sous une pochette sylvestre et un titre programmatique : Vif !

On y croise des vers de terre (« Entre la terre et l’argile / La microfaune se faufile / Au ras du sol, s’agite, agile »), une femme enforestée (« Tu ne me reconnais plus / Car dans un arbre, me suis fondue / Deux trois saisons rien de plus / Inutile de me chercher j’ai disparu »), une graine dans les airs (« Où est cet espace où elle aimerait se poser / Le voyage en l’air touche à sa fin »), des amants à la belle étoile (« La chaleur du feu s’étire / Vers le sommet des arbres / Les flammes et braises apaisent / Nos cœurs bouillants fusionnent ») et le disque s’achève sur une phrase « J’ai pris la route vers la forêt » qui semble répondre au Dernier appel de la forêt de Dominique A. Le ton est pourtant bien plus enjoué. Ici, la chanson semble souvent dorée par le soleil et gorgée de chlorophylle. Une basse mutine martèle le rythme, des claviers délicieusement acidulés zézaient, une voix d’éternelle enfant s’empare avec gourmandise de sujets inédits… Loin de l’asphalte, Françoiz Breut a retrouvé les recettes du vivant !

Photo de têtière : François Mauger

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