Le Disjoncté : « Oui, on peut faire un festival sans électricité »

« Oui, on peut faire un festival sans électricité. La preuve : c’est la cinquième édition… C’est compliqué, je ne vous le cache pas, mais c’est possible ». Au téléphone, Maud de la Chapelle parle très vite. Visiblement, le temps presse. Son festival, Le Disjoncté, n’est que dans quelques jours. Installé sur les rives du lac du Coiroux, juste au-dessus de la commune d’Aubazines, entre Brive et Tulle, il a, outre sa gratuité, deux particularités majeures : ne pas dévoiler sa programmation à l’avance et se passer d’électricité.

Qui dit pas d’électricité, dit pas d’amplification. « On ne prend que des instruments acoustiques » explique-t-elle. « Il y a d’ailleurs des contraintes que les spectateurs ne devinent pas : il faut par exemple que la balance des instruments se fasse naturellement. Si vous avez un piano et des percussions, on n’entend plus le piano. Au bord du lac, il faut aussi éviter les instruments qui craignent l’humidité et le soleil. Pas d’amplification, ça veut dire que les spectateurs entendent peu. Pour répartir le public, il faut donc faire jouer plusieurs groupes en même temps, parce qu’on a énormément de monde. Il y a donc 3 ou 4 scènes actives en même temps. Elles sont suffisamment espacées pour ne pas se déranger d’un point de vue acoustique, si on fait attention à ne pas programmer des percussions en même temps qu’un solo de piano. »

L’autre problématique évidente est celle de la lumière. « On a énormément de bougies sur le site, on va en avoir 2 500 cette année » répond la jeune femme. « Elles servent à éclairer et à faire du marquage au sol, pour que les gens ne se fassent pas mal dans le noir. Les bougies dessinent les allées sur lesquelles les gens circulent. Pour éclairer les scènes, on a fabriqué des lampadaires. Ils servent aussi au bar ou aux stands de nourriture. On fabrique des spots avec des pots de plante dans lesquels on met de l’aluminium. On a des lampes à huile, des lampes à pétrole, des lampes tempête et de gros braseros. Les gros feux, on les dispose sur le lac et sur la plage, pour que ce ne soit pas dangereux. »

« Le vrai problème technique », précise-t-elle, « c’est celui que posent le bar et la restauration. Sans frigo pour servir des bières fraîches, sans électricité pour faire fonctionner les tireuses, c’est très compliqué. La première année, on avait calibré le festival pour 300 ou 400 personnes, il y en a eu 1500. Forcément, on était débordé. L’année d’après, on avait trois fois plus de bénévoles, on avait multiplié les bars par deux mais ça n’a pas suffi. Aujourd’hui, on sert des canettes qu’on refroidit avec de la glace. Désormais, il y a de quoi manger et de quoi boire sans file d’attente. »

Le festival, qui a lieu chaque année au tout début du mois de septembre, est un miracle d’équilibre. « On programme des genres musicaux complètement différents. Le principe est de faire découvrir plein de choses aux gens, qui viennent pour le concept, pas pour la programmation (qu’ils ignorent). On essaie de faire varier les esthétiques et les instruments. On s’ajoute la contrainte d’avoir des moments festifs et des moments plus calmes, plus poétiques, plus intimistes. Le résultat, on le découvre le soir même. On ne peut pas faire d’essais avant. On ne s’amuse pas à allumer la veille 2 500 bougies pour savoir ce qu’elles donnent. Même chose pour les musiciens : ils n’arrivent que le jour du festival. Pour nous, chaque édition est une expérimentation. Par définition, on vit la soirée en même temps que les spectateurs. »

Il ne reste donc qu’à souhaiter à toute l’équipe du Disjoncté une très bonne soirée…

Photo de têtière : François Mauger
Autres photos fournies par Le Disjoncté (Lucie Leg)
Pour aller plus loin...
Le site web de l'association Grive la Braillarde, qui organise l'événement

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